Soutien aux Tanneries
Ca fait bien longtemps que je n'ai plus mis les pieds aux Tanneries. Mais comme un navire fantôme, le long bâtiment dijonnais décide de réapparaître à ce moment propice et électoral.
Squat avant tout, espace autogéré, lieu de diffusion artistique (théâtre, musique, arts plastiques), lieu de dialogues, organisateur d'ateliers de pratique et centre de ressource, c'est l'une des rares expériences de diffusion réellement alternative que
je connaisse et qui dure.
Ca fait en effet 10 ans que les Tanneries existent, et pour ceux qui ont une petite idée de ce que signifie l'auto-gestion, force est de reconnaître que cette longévité impose le respect.
Les Tanneries, c'est une ancienne usine de traitement des peaux annexée par des utopistes militants afin d'en faire un centre d'art et de réflexion. Ni plus, ni moins.
Investie fin 1998, c'est peu dire que la structure a survécu à de nombreuses tentatives de fermeture, intimidations, voire incendies plus ou moins intentionnels.
En 2002 pourtant, un accord semblait avoir été trouvé avec la Mairie de Dijon, autorisant les Tanneries à continuer leurs activités à condition de remédier à quelques problèmes de sécurité dûs à la vetusté des locaux.
Mais comme il n'est pas meilleur moment pour faire passer la pilule qu'une veille d'élection, où toute l'attention publique est focalisée sur des sujets aussi passionnants que le drapeau tricolore et la Marseillaise, c'est aujourd'hui que François Rebsamen (maire de Dijon et chef de campagne de Ségolène Royal) a choisi de tout simplement vendre les Tanneries en douce, afin de laisser construire un multiplex de la médecine (complexe de cliniques privées) s'étendant sur 10 héctares à la périphérie de la ville.
Autant dire que si l'expulsion programmée des Tanneries est déjà dure à avaler, la finalité du projet est d'autant plus écoeurante, venant d'une municipalité de "gauche" dont le discours de campagne se gargarise de mots comme "services publics" ou "égalité des chances".
Mais tout ça n'est au fond que la cerise sur le gâteau, tant aucun citoyen éclairé n'a le moindre doute sur la soumission totale des énarques autoproclamés socialistes à tous les rouages du capitalisme contemporain.
Ainsi la vraie question aujourd'hui est une question de liberté de diffusion artistique, le même débat que la défunte Gauche Plurielle avait relancé en 2001 en commandant un rapport sur les squats et lieux de diffusion autogérés.
Je ne me relancerai pas dans une explicaion parce que je l'ai déjà faite à l'époque, mais par ce message, je souhaitais simplement apporter mon soutien total aux Tanneries et dire à nouveau, redire, et reredire à quel point il me semble aujourd'hui inévitable, pour créer de grandes choses, de se débarasser de tout soutien institutionnel.
En avril 2000, je faisais ma première performance publique.
Ca s'appelait "C'est ma peau contre la votre" et ça se passait aux Tanneries.
Pas parce que c'était des copains - je ne connaissais même pas les gens qui vivaient là-bas. Non, ma performance a eu lieu là-bas parce qu'à une époque où je n'avais rien prouvé, où j'étais totalement inconnu (je le suis à peine aujourd'hui, alors imaginez il y a 7 ans...), des gens m'ont fait confiance, comme ils ont fait confiance, pendant 10 ans, à des centaines d'autres groupes artistiques de tous les domaines.
Ce luxe, aucune structure institutionnelle ne pourra jamais se le permettre et c'est cette fondamentale liberté de programmation qu'il faut défendre, en plus de la démonstration par l'exemple que l'auto-gestion est possible, sur des bases saines et créatives.
4 commentaires:
un petit mot aussi ; plus que la confiance (obligée) dans l'acquisition d'un lieu légal ou abandonné qu'il faut gérer au mieux dans une précarité évidente, c'est le probléme (comme toujours) de la place des arts vivants (arts plastiques , arts du spectacles ou d'expressions) dans le modéle administratif qui est périlleux.
Tout lieu forcément "privé" squaté ou loué dépend tout de m^me des institutions et ne peux être un no mans land de créaivité ou de débauche. Les mairies de gauche ont donc plus particuliérement envie de récupérer "l'affaire" si cela en est une, et dans le cas des T-anneries , ils se font virer pour y mettre des malades.
soit , réserve-t'il un autre lieu pour des arts vivants ou a coup de bulldozer, d'or noir et d'arrangements, ils démobilisent ce qui a était construit ou établis dans une fraternité retrouvée.
Avec un peu de chance ils nous feront un musée à la place.
Keep connect.
Je te trouve bien optimiste.
Et de mon côté, j'aurais plutôt tendance à croire que la mairie veut purement et simplement se débarasser de ces trublions en jugeant ce qui se passe là-bas, non pas dangereux, mais juste nul. Et quant au problème des arts vivants sur Dijon, je pense que c'est désormais le cadet des soucis de la municipalité qui doit penser que tout est parfait dans cette ville. Imaginez, cette ville abrite tout de même un Centre Dramatique National (constitué de 2 salles) ainsi que deux autres salles de théâtre (les Feuillants et Mansart), une salle de musique actuelle (Athéneum) et un Zénith tout fraîchement inauguré.
Je doute que la Mairie juge nécessaire de préserver un lieu qui, à ses yeux, n'est rien de plus qu'un repaire de feignants végétaliens....
l'appétit vient en mangeant..
Débarrasser , les mettre en camp, foutre le camp vers où ? En allemagne les squates sont des nids d'oiseaux dont les habitants se chargent de nourrir en graines multiples. Chez nous ce sont les institutions qui s'en chargent et ceux qui n'ont rien d'institutionnel n'ont que la privation pour s'exprimer.
heureusement la rue est grande et les salles d'attentes sotn en multiplexes , mais attention , défense de s'allonger , le tabac est proscris dans les lieux publiques..
c curieux tout de m^me de s'appercevoir que ceux qui sont payés foutent dehors ceux qui ne sont pas payés..
Ce qui est gratuit est donc payant et ce qui est payant devient gratuit, nul d'intéret mais reste payant pour entre-tenir.
tiens, pour une fois, totalement d'accord avec toi troudair. c'est ce genre de lieu qu'il faut, et c'est ce genre de lieu qui est systématiquement éliminé (il y en avait bcp + ne serait-ce qu'il y a une dizaine d'années). à paris c'est flagrant, et désolant (très peu de lieux alternatifs pour une agglo de 11M d'habitants). et c'est typiquement français : au royaume-uni, en hollande, en allemagne, et pas mal d'autres pays, les choses se passent différemment : ce genre de lieux y est plus répandu, plus toléré.
Enregistrer un commentaire
<< Accueil