Troudair Revolutions

Fil d'info en continu sur les conséquences de la fin du monde qui a eu lieu le 15 décembre 1999.

22 octobre 2005

Guide pratique du blogger et du cyberdissident

Ce petit guide pratique ne sera probablement pas très utile à la plupart des blogs que je connais, mais possède au moins le mérite de nous rappeler que nous avons entre les mains un outil puissant et qui pourrait changer le monde... si on savait quoi dire, bien sûr.
C'est publié par Reporters Sans Frontières et donne de nombreuses astuces sur la manière de publier anonymement, contourner les outils informatisés de censure, bref, s'exprimer librement sur le web.
Bon, le problème, et je ne m'exclue pas du lot quand je dis ça, c'est que c'est justement au moment où on possède l'outil qu'on n'a bizarement plus rien à dire.
Parce que rendons-nous à l'évidence, nos blogs à tous n'ont rien de subversif, rien de gênant pour le pouvoir en place, et encore moins pour les actionnaires pétés de fric qui viennent d'ailleurs de voir leur ISF allégé.
La guerre, je suis bien d'accord, et pendant longtemps, ça a été de s'élever contre la censure. La vraie, avec des ciseaux qui coupent, et qui sévit encore dans de nombreux pays.
Mais aujourd'hui, ça n'est pas contre un ennemi armé d'un feutre rouge qu'il faut combattre. C'est contre notre propre incapacité à nous élever contre une injustice... Parce que les moyens de dire tout ce qu'on veut, on les a. Et qu'est-ce qu'on en fait ? Qu'est-ce qu'on trouve de si crucial à dire ? Que je suis en vacances ? Que Machin ou Trucmuche est venu me voir ? Que je ne sais pas trop si il faut que j'achète une maison plutôt qu'un appartement ?
Oh, je sais, on va me répondre avec quelques contre-exemples, de moments où dans nos civilisation occidentales, il y a eu une injustice, et que cette injustice a été révélée grâce à cette liberté d'expression si chèrement acquise, et je suis prêt à le reconnaître.
Mais ma grande peur, c'est que dans ce déluge de tout et de n'importe quoi, on finisse par oublier tout ça. Oublier petit à petit de se servir de notre droit de l'ouvrir, parce que dans toute cette bordelo-sphère, il y a surement quelqu'un qui y aura déjà pensé, et/ou qui l'aura mieux dit, et se contenter de parler de nos vies, des choses minuscules qui nous arrivent à nous tous les jours, parce que ce sont définitivement les seules originalités qu'on pourra trouver à publier.
Il y a quelques jours, Pouic m'a demandé de participer à son réseau de Freemen.
Bon, c'est vrai, j'adore Dune, moi aussi, mais je me sens quand même très mal avec ce type de rassemblements autour de grandes pensées. Non pas que je sois contre les idées exprimées, mais pour moi, le problème se situe vraiment aujourd'hui à un autre niveau, beaucoup plus subtil, et que j'expliquais ci-dessus. Les notions comme l'humanisme, la solidarité, la liberté, l'égalité, etc., sont des concepts tellement consensuels qu'ils ne peuvent QUE recueillir les suffrages de tout le monde. C'est exactement ce qui se passe quand Chirac et Sarkozy font de la sécurité routière une priorité, ou encore de la recherche contre le cancer. Qui ira dire "Non, il faut que les gens meurent sur la route et agonise en chimio" ? Personne, encore heureux. Et c'est ça qui me chagrine avec les Freemen. Qui ira dire "Moi je suis pour la pollution de la planète et pour que ça continue comme ça jusqu'à ce qu'on y passe tous" ? Même Le Pen pourrait adhérer aux Freemen avec une telle définition d'objectifs.
C'est pour ça que j'ai pas forcément répondu "à chaud", et que je préfère le faire maintenant publiquement, en toute amitié, et en espérant que ça ne vexe personne.
J'ai donc dérivé un peu de l'objet premier de mon post, qui était consacré à ce fameux "guide pour les bloggers qui en ont besoin", mais pour finir et relier tout ça, je vais citer Deleuze pour changer, et vous laisser méditer.
Promis, dans mes prochains posts, tout redeviendra normal et je continuerai à vous demander votre avis sur ce que je dois manger demain midi...

"Le problème n'est plus de faire que les gens s'expriment, mais de leur ménager des vacuoles de solitude et de silence à partir desquelles ils auraient enfin quelque chose à dire."
Gilles Deleuze

8 commentaires:

À 22 octobre, 2005 20:18 , Blogger p. a dit...

Je suis plus que d'accord avec Deleuze [quel grand homme ce bouec], j'affectionne particulièrement la case vide - celle qui me permet d'avancer - dans les mondes parallèles.

J'ai beaucoup aimé Auxerre.

 
À 23 octobre, 2005 00:32 , Anonymous un pote à Pouic a dit...

Hum la citation intégrale de GD est mieux :
"Nous sommes transpercés de paroles inutiles, de quantités démentes de paroles et d’images. La bêtise n’est jamais muette ni aveugle. Si bien que le problème n’est plus de faire que les gens s’expriment, mais de leur ménager des vacuoles de solitude et de silence à partir desquelles ils auraient enfin quelque chose à dire. Les forces de répression n’empêchent pas les gens de s’exprimer, elles les forcent au contraire à s’exprimer. Douceur de n’avoir rien à dire, droit ne n’avoir rien à dire, puisque c’est la condition pour que se forme quelque chose de rare ou de raréfié qui mériterait un peu d’être dit. Ce dont on crève actuellement, ce n’est pas du brouillage, c’est des propositions qui n’ont aucun intérêt."

 
À 24 octobre, 2005 09:37 , Anonymous Casabaldi a dit...

Salut Troudair,
Bon, on va donc faire sans toi. Mais c'est dommage parce que le trcu va un peu plus loin que ce que tu décris. Tu as sans doute lu un peu vite. Il s'agit en effet, en partant d'un sujet effectivement très consensuel, le chgt climatique, de remettre en cause les modèles économiques de croissance de nos sociétés. C'est donc nettement plus ambitieux que ce que tu décris et mériterai presque un petit erratum. Je te laisse juge.
(un pote de Pouic, Deleuze, du pote de Pouic, et des freemen)

 
À 24 octobre, 2005 11:00 , Blogger Troudair a dit...

Qu'on soit bien d'accord.
Je ne m'élève pas CONTRE les Freemen, ni même contre l'idée de créer un réseau, quelle que soit sa forme.
Il s'agit simplement pour moi d'un problème de conscience, et d'appartenance à un groupe, disons "abstrait", qui me renvoie fortement à cette (auto-)citation d'un épisode du feuilleton "Une autre révolution" :
"- Heuuu... intervint Marie-Géraldine. Ca a toujours été plus ou moins la merde.
- C'est vrai, rétorqua Jean-Christian, mais nous ne le savions pas ! Et personne ne culpabilisait pour ça !
- Alors c'est pour ça qu'il faut détruire le système, demanda Jean-Vivien. Il ne s'agit pas de rendre la vie des hommes meilleurs, mais seulement de ne plus culpabiliser d'être heureux ?
- En ce qui me concerne, c'est à peu près ça, répondit Jean-Christian. Parce que sans déconner, j'ai pas vraiment à me plaindre de ma vie à moi. Vous avez à vous plaindre vous ?"
Attention, je ne raille pas du tout les gens qui ont foi en cette initiative, mais en ce qui me concerne, je sais que mon appartenance à ce groupe relèvera plutôt de l'attitude d'un Jean-Christian plutôt que d'un José Bové. Je ne veux pas soulager ma conscience en linkant quelques blogs et me dire que "tout va un peu mieux qu'avant", parce que je me connais, et je connais mes gestes quotidiens qui vont à l'encontre de mes idéaux, mais que j'execute tout de même, par feignantise, ou par fatigue, ou par désespoir.
Ainsi, et comme je le dis dans ce post, si je me bats pour le moment, c'est contre moi-même et ma propre inertie, et j'ai bel et bien cessé, pour un temps du moins, de m'en prendre au voisin parce qu'il a un 4x4, ou à la voisine parce qu'elle ne trie pas ses déchets.
Et je rajoute encore une citation, si ça ne vous fait rien, extraite du "Petit bourgeois gentilhomme" de Alain Accardo, un petit ouvrage dont je me sens assez proche parce qu'il recentre lui-aussi le débat sur l'individu contestataire et son incapacité à se libérer lui-même de ses propres contradictions :
"Mais si Gulliver veut vraiment se remettre debout, quelques soubresauts désordonnés n'y suffiront pas. Il lui faut réfléchir sur la façon dont il est ligoté et s'aviser que parmi les liens très fins qui l'immobilisent, il y a ses propres cheveux. Les Lilliputiens le tiennent en leur pouvoir en se servant de son propre corps et, puisqu'il accepte de se tenir tranquille, ils le récompensent en le nourrissant de gigots minuscules, "plus petits que des ailes d'alouette". Quelle parabole pourrait, mieux que celle de Swift, résumer la condition actuelle des classes moyennes dans les démocraties bourgeoises ?"
Voilà où je veux en venir.
Pour filer la parabole, je préfère tenter de me détacher, cheveu par cheveu, même si c'est insignifiant, plutôt que d'entreprendre un soubresault spectaculaire qui ne changera rien à ma condition, et avec un peu d'espoir, allez savoir, à la notre.

 
À 24 octobre, 2005 14:11 , Anonymous Casabaldi a dit...

Très juste Troudair, mais tellement triste, et finalement, tellement terre à terre...
Et jamais tu n'imagines autre chose ? Jamais tu n'imagines qu'on puisse dépasser ses propres contradictions pour passer à autre chose, de tellement, infiniment plus intéressant ? Parce qu'enfin, sincèrement, que tu tries ou pas tes poubelles, franchement, on s'en tape un peu, non ? Bien sur, c'est important... pour toi... un peu pour tout le monde. Mais tu n'as pas l'impression que ce petit souci est inclu dans quelque chose d'un peu plus... lourd ? un peu plus grand ? Et une fois que tu auras fait ça, tu feras quoi ? Tu couperas l'électricté sous prétexte qu'elle est nucléaire ? Non, tu vois, 100% d'accord avec toi sur le "j'ai arrêté d'emmerder ma voisine". Mais je doute que ce soit en t'appliquant à toi ce que tu n'appliques plus à ta voisine qu le schmilblik avancera plus vite. Il y a un moment où on n'abolit pas l'escalavage par la prise de conscience de chaque esclavagiste. (ds le genre "oui, je comprends mais comme je ne suis pas encore parfait, je préfère essayer de libérer encore un de MES esclaves avant de faire quelque chose pour l'abolition de tous). Tu me suis ? Bref, je m'emporte un peu... pas grave.

Tiens dans la famille Deleuze, j'aime aussi beaucoup celle là : "L'imaginaire, ce n'est pas l'irréel ; c'est l'indiscernabilité du réel et de l'iréel". Et tu vois, les freemen, et bien c'est ça aussi.
ciao.

 
À 24 octobre, 2005 15:04 , Blogger Monsieur Ko a dit...

Et encore toi tu as des cheveux...

 
À 26 octobre, 2005 23:24 , Anonymous k/lu a dit...

hurler dans le vide, le vrai, ne doit pas servir à grand chose, même l'écho ne peut plus rien. Sans corde vocales ce n'est guère aisé non plus.
Mais beugler dans un brouhaha invraisemblable revient dans le meilleur des cas à se rendre audible de son seul auditoire proche.
En fait je crains que l'écoute soit désormais l'activité la plus difficile, pour qui cherche à entendre. hein?

 
À 18 avril, 2006 10:16 , Anonymous Anonyme a dit...

je pense que pour remettre les pendule s à l'heure il serai bon de faire une
action intelligente.Style pas de véhicule en circulation une journée
compléte.De cette façon on pourrai voir rapidement qui n'est pas gêné par
le prix des carburants.De plus,nos dirigeants réfléchiraient peut-être avant de pondre des lois stupides sur les radars et autres atteintes graves aux libertées légitimes des citoyens.Je ne peux pas croire que les moyens financiers de certain puissent être un passeport pour la pollution.Quant à la sécurité elle ne peut ce consevoir qu'avec des réalités et non pas dans une utopie polique.On évitera içi d'argumenter sur les pseudos proches de victimes effectuant leur térapie en public,afin de fustiger les uns et les autres sans aucunes connaîssances de la réalité si ce n'est qu'un profit indecent des morts sur lesquels ils s'appuient pour nous servir des théories ridicules et sans aucun doute malsaines.

 

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